L’Aiguillage, passion nature

L’une et l’autre ont fait leurs armes au Café Lumière, dans un environnement culturel qui ne pouvait qu’aviver leur idée de se lancer dans une aventure plus personnelle pour mettre en œuvre leur conception d’une restauration authentique. La direction prise en 2018, celle de L’Aiguillage, en est, jusque dans l’enseigne, l’illustration. En reprenant l’établissement, Élodie Illes apportait sa formation de BTS hôtellerie-restauration et plusieurs expériences, tant au service qu’aux fourneaux. Sa complice Natacha Bazoge y adjoignait son propre parcours de cuisinière d’un restaurant de montagne. Les deux se retrouvant avec le même goût prononcé pour une cuisine au plus proche de la nature, des saisons et du bio, sous-tendue par une économie de circuit court et par un intérêt porté à l’équilibre nutritionnel des plats proposés. Une démarche inspirée par une philosophe de l’existence, ce que le nom choisi pour leur société ne manque pas de souligner avec malice, dans un mot-valise réunissant féminin, cuisine et écologie : l’écocotte…

Une ligne à la fois féminine et responsable

Depuis, Natacha est partie développer de son côté les ateliers qu’elle consacre à la cuisine végétale, et Élodie officie seule en cheftaine à la tête d’une équipe qui affiche résolument sa couleur fille. Un seul garçon, Pierre, se retrouvant au côté de Luce, Lary, et Sophie en cuisine, et de Justine, Sitora et Maelis en salle. Un maître-mot anime l’équipage : apporter, tant dans l’accueil que dans les préparations, un plaisir de bien-être et de goût partagé. La carte le traduit, qui propose en permanence trois plats propres à satisfaire toutes les tendances : un vegan, un végétarien et un de viande ou poisson. Comme la carte change tous les 15 jours, les menus offrent une variété continue, chaque plat comportant de cinq à huit préparations. La seule base qui s’y maintient est la trame végétale : peu de beurre, peu de crème, à peine un peu d’huile, soit une cuisine sans gras visant à mettre en valeur le produit.

Ainsi, ce jour-là, le saltimbocca en entrée respectait son italianité natale, avec ses tranches de quasi de veau roulées dans du jambon, mais ici sur un lit de roquette et de fèves relevé du piquant d’une vinaigrette de cerise. Pour suivre, les acras de courgettes excluaient toute présence de morue, mais composaient un ensemble aussi riche en goûts, avec leurs lentilles froides aux noix de cajou, leur carpaccio de concombre au citron vert, leur pointe de piment et d’ail frais et leur boule de yaourt relevé de féta. De quoi faire souffler un vent léger, bien en accord avec la salade abricot finale rafraîchie d’une glace au yaourt, d’un crémeux au basilic et d’un filet d’huile d’olive. En harmonie aussi avec un rosé bio du Languedoc, couleur abricot, dont l’étiquette annonçait la bienheureuse paresse à laquelle il incitait : Poil dans la main. Tout un programme…

Jean Serroy

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