Ce que coopérer à l’heure de la crise économique veut dire
Plus présente et concrète chaque jour, la crise économique majeure que nous vivons nécessite d’inventer des réponses et solutions nouvelles. Les ambitieux dispositifs d’accompagnement déployés au niveau macroéconomique par les États nationaux ou l’Union européenne témoignent d’une réelle volonté de soutenir l’activité, les entreprises et l’emploi, ainsi que d’un apprentissage des erreurs commises lors des crises précédentes (ce qui ne garantit en rien l’absence d’erreur cette foisci). Mais les aides apportées à ce niveau, bien que nécessaires, ne sauraient être suffisantes. Les entreprises et organisations elles-mêmes se doivent, à un niveau microéconomique, de mettre en œuvre les conditions de leur résilience, très largement dépendante de celle de l’écosystème économique auquel elles appartiennent.
Des progrès notables dans la coopération de développement
Ces dernières années se caractérisaient par une prise de conscience de l’importance de la coopération entre les entreprises. Cette dernière était appréhendée comme un moyen de faire mieux qu’avant, c’est-à-dire de créer de la valeur, notamment en innovant ensemble plus efficacement que seul (en co-innovant donc). C’est ce que j’appelle la “coopération de développement” (plutôt que”coopération de croissance”, le terme “croissance” étant très discutable). Les intérêts économiques bien compris, plus que la philanthropie ou la bienveillance, guidaient le développement de pratiques coopératives bienvenues. De nombreux projets coopératifs (d’innovation, de développement…) sont aujourd’hui remis en cause, chaque organisation ayant tendance à se focaliser sur sa propre survie. C’est à la fois compréhensible et déplorable. Le pire toutefois réside dans nos grandes difficultés à imaginer une réelle “coopération de crise”.
La “coopération de crise” : revenir aux vertus de la main tendue
C’est dans ce que j’appelle la “coopération de crise” que les progrès les plus importants restent à faire. La situation d’urgence vitale dans laquelle se trouvent, ou vont se trouver, de nombreuses entreprises, rend peu pertinents les projets de coopération aux retombées incertaines dans cinq ou dix ans. Ce dont ont clairement besoin aujourd’hui les partenaires économiques (clients, fournisseurs, concurrents…), c’est d’une aide, sous forme de main tendue, à très court terme. Respecter les délais de paiement, lisser (ou délisser, c’est selon) les achats, gérer de façon coordonnée les trésoreries… sont autant de pratiques aujourd’hui essentielles. Fort heureusement, de nombreux exemples témoignent d’une salvatrice prise de conscience de l’importance de la démarche, y compris de la part d’entreprises soumises à de rudes difficultés (Safran, PSA…). Si aider l’autre quand tout va bien semble donné à tout le monde (ce qui n’enlève rien au mérite de celui qui le fait), faire de même quand tout va mal témoigne d’une réelle responsabilité.
Réinventer la coopération dans le monde qui vient
Ce sont bien les pratiques relevant de la coopération de crise qui doivent être déployées à très court terme, pour garantir la possibilité d’œuvrer ensuite au développe-ment d’une économie pacifiée. Tendre la main au fournisseur, au client ou même au concurrent en difficulté est aujourd’hui le meilleur moyen de contribuer au bien commun. L’injonction, sans doute paradoxale, à laquelle nous arrivons serait alors la suivante : “Soyons court-termistes, tendons donc la main à nos partenaires économiques !”
"Tendre la main au fournisseur, au client ou même au concurrent en difficulté est le meilleur moyen de contribuer au bien commun."
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