Le télétravail et le droit à la déconnexion
Si les employeurs faisaient montre d’une certaine frilosité à l’égard du télétravail, le développement accru des nouvelles technologies, conjugué à la crise sanitaire de la Covid-19, ont bouleversé les habitudes des entreprises. Le télétravail s’est démocratisé, imposant une vigilance accrue des conditions de travail des salariés.
Avant la pandémie, seulement 3% des salariés pratiquaient régulièrement le télétravail, contre 40% en 2020-2021. Malgré la distance, ce recours massif au télétravail impose de définir de nouvelles règles relatives à la durée du travail et au respect du droit à la déconnexion.
• La notion de droit à la déconnexion
Le droit à la déconnexion1 vise à protéger le salarié contre une connexion permanente2 . Il peut s’entendre comme le droit pour tout salarié de ne pas être connecté à un outil numérique professionnel en dehors du temps de travail3.
Il convient de remarquer que s’agissant d’un droit octroyé au salarié, il importe en réalité à l’entreprise d’en délimiter le contour.
• La mise en œuvre pratique du droit à la déconnexion
Les employeurs encadrent le droit à la déconnexion via un accord collectif ou une charte, dont l’objet peut outrepasser le thème de la déconnexion. En effet, le droit à la déconnexion peut être abordé dans le cadre d’un accord relatif à la mise en place des forfaits annuels en jours, ou encore dans le cadre d’un accord relatif aux conditions de travail.
Qu’il s’agisse d’un document spécifique au droit à la déconnexion ou d’un document avec un objet plus large, celui-ci prévoit des actions de formation et de sensibilisation contribuant à un usage raisonnable des outils numériques, en conformité avec les usages d’entreprise et la convention collective applicable.
En pratique et dans l’entreprise, l’employeur met en œuvre des mesures :
- « actives » : couper l’accès aux outils numériques le soir et le week-end, placer des brouilleurs Internet dans les salles de réunions, etc.
- « préventives » : sensibiliser et former les salariés et les managers, préconiser des plages d’envoi et de consultation des e-mails, mettre en place des messages automatiques lors de connexions matinales ou tardives, etc.
• La conciliation du droit à la déconnexion avec le télétravail
Placé en situation de télétravail, le salarié bénéficie du droit à la déconnexion, l’un des garants de l’équilibre vie privée/vie professionnelle.
Le législateur vise d’ailleurs indirectement le droit à la déconnexion dans le cadre du télétravail en ce qu’il impose la fixation de « plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail4 ». La mise en place de ces plages horaires pour les télétravailleurs est nécessaire en ce qu’elle assure la déconnexion du salarié en dehors de ces dernières.
À ce titre, il paraît parfaitement approprié de lier le télétravail avec le droit à la déconnexion, ce qu’on ne saurait que conseiller aux employeurs qui souhaitent pérenniser la pratique au sein de l’entreprise, par la rédaction d’une charte ou d’un accord collectif.
Article rédigé avec la contribution d’Anaïs Vandekinderen et Ibtissam Aftisse, avocats, cabinet Fidal
1Loi n°2016-1088, 8 août 2016 dite « Loi travail » relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, article L. 2242-17du Code du travail.
2Christiane Ferahl Schuhl, « Chapitre 144 - Principes généraux pour le respect de la vie privée de l’employé», Praxis Cyberdroit, 2020-2021.
3INRS, « Droit à la déconnexion : comment le mettre en œuvre dans l’entreprise ? », 28 novembre 2019.
4Article L. 1222-9 du Code du travail.
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