Industrie — Le 27 août 2024

Les Hautes Glaces, les grains de l’engagement

Produire un whisky haut de gamme en tirant le meilleur parti d’une agronomie alternative respectueuse de l’identité et des qualités du terroir : c’est le pari réussi de cette ferme-distillerie bio, qui fête quinze années d’expérimentation et de passion.

Frédéric Revol, fondateur des Hautes Glaces © F. Ardito

Le 16 octobre prochain paraît Whisky de montagne. La terre, le grain et le goût, aux éditions Terre vivante (Mens). Un beau livre qui retrace en 224 pages la grande aventure du Domaine des Hautes Glaces, première ferme-distillerie bio au monde, créée en France en 2009. Sur un mode intimiste, Frédéric Revol, son dirigeant fondateur, dévoile au lecteur l’engagement sociétal et environnemental qui préside à chaque étape de la fabrication de ces spiritueux pionniers, entre expérimentation agronomique poussée et recherche gustative incessante. « Nous avons dès le départ fait le choix d’une agriculture régénérative, sans aucun produit de synthèse et préservant la biodiversité et la santé des sols du Trièves », raconte Frédéric Revol. Cet ancien ingénieur agronome a conçu ses whiskys dans une approche dynamique, en interaction permanente avec son environnement, où même les pailles des céréales utilisées font du compost pour les futures cultures et servent à la fabrication des bouchons des flacons.

Deux gammes, une même exigence

En quinze années couronnées par des prix réguliers (dont le dernier, lauréat du Grand Prix de la Revue du vin de France 2022), les Hautes Glaces ont impulsé une microfilière à l’échelle du terroir : une quinzaine d’exploitants bio locaux, réunis au sein de l’association Graines de cimes, apportent une partie de leurs moissons d’orge et de seigle pour la préparation des capiteux breuvages. Des artisans de la terre, qui travaillent aussi à la reconquête de variétés anciennes et oubliées, en lien avec des acteurs de la recherche tels que l'Inrae et le Cirad, pour offrir aux Hautes Glaces d’intenses perspectives. Pour l’heure, l’entreprise a segmenté sa production (quelque 15 000 bouteilles par an) en deux gammes : l’une, incluant un single malt et une eau-de-vie 100 % seigle, évolue au gré des distillats qu’elle agrège chaque année. L’autre, exploratoire, joue sur une multitude de paramètres comme l’orientation des parcelles, la variété du grain ou encore la nature du fût pour des whiskys forcément rares, en éditions très limitées.

Ambitions internationales

Adossées depuis 2017 au groupe Rémy Cointreau, les Hautes Glaces ont bénéficié des moyens de production et du temps nécessaires à l’application de leurs préceptes. Dans sa nouvelle distillerie aménagée à partir de 2020, l’entreprise a notamment installé un chai semi-enterré pouvant contenir jusqu’à 4 000 fûts et autres contenants, ainsi que quatre alambics en cuivre chauffés au feu de bois, dont l’excédent énergétique ajoute au confort des vastes bâtiments l’hiver. Un douillet caveau accueille le public pour des séances de dégustation à la fin des visites guidées, quand le domaine tout entier ne s’ouvre pas à des résidences d’artistes. Un vrai lieu de vie, animateur et protecteur du plus haut plateau céréalier d’Europe : les spiritueux exigeants des Hautes Glaces défendent les valeurs du Trièves jusqu’au fond de leurs flacons reproduisant ses cimes, en France, mais aussi à l’export. Le Royaume-Uni et la Suisse ont commencé à succomber, comme bientôt l’Italie, l’Allemagne, le Japon…

R. Gonzalez