La paix économique : une culture à diffuser pour le bien commun et l’intérêt général
Créée en 2012, la chaire Paix économique de Grenoble École de Management est devenue en 2023 chaire Unesco « pour une culture de paix économique ». Au-delà d’une reconnaissance méritée, la labellisation de la chaire témoigne de la place qu’occupe désormais la paix économique dans les riches débats qui la concernent : celle d’une véritable culture qu’il importe de diffuser.
La paix économique élevée au rang de culture
Cette culture de paix repose sur le lien entre les trois grands niveaux de réflexion sur la paix économique, faisant de cette dernière une fondation (véritable « porte d’entrée pour faire la paix avec soi-même, puis les autres et le monde1 »), une orientation (avec tout ce qui peut la caractériser, comme notamment des valeurs, des buts et des conditions de succès) et enfin un chemin (avec des modalités concrètes concernant les pratiques de management et l’évolution des relations dans et entre les organisations). L’intégration de ces niveaux de réflexion est en effet essentielle pour caractériser la culture de paix économique que l’Unesco reconnaît comme si importante et bienvenue. Elle est essentielle comme l’est la reconnaissance, présente dès le départ et si déterminante pour la suite : la paix intérieure, la paix dans les relations sociales les plus proches et la paix au niveau macro (le premier nom de la chaire, en 2012, était celui de chaire « Mindfulness, bien-être au travail et paix économique », faisant le lien de façon claire entre les trois niveaux complémentaires).
Remettre la rentabilité à sa « juste place »
Résumer la paix économique en quelques lignes n’est pas chose aisée. Dominique Steiler nous y aide via une formulation limpide. Si l’entreprise est vue comme une organisation à moteur social et à finalité économique, la paix économique propose d’envisager l’entreprise comme une organisation à moteur économique et à finalité sociale. Tout, ou presque, est dit. Là où le modèle traditionnel tend à sacrifier (éventuellement broyer) l’humain si le jeu, essentiellement résumé en termes de rentabilité, « en vaut la chandelle », la proposition de la paix économique consiste à remettre la rentabilité à sa « juste place », celle d’un moyen plutôt que d’une finalité. Il ne s’agit bien sûr pas de renoncer à la rentabilité, un tel renoncement s’avérant non responsable puisqu’il mettrait en péril l’entreprise et en difficulté tous ceux qui en dépendent. Il s’agit plutôt de voir la rentabilité comme le moyen d’être « encore là demain », et de mettre cette existence, cette pérennité, au service de quelque chose de plus grand et de plus important : le bien commun, la préservation, voire le renforcement, du lien social (le fameux doux commerce qu’évoquait Montesquieu), ou encore apporter des éléments de solutions au problème du changement climatique. En écrivant leur raison d’être ou leur mission, la majorité des entreprises ne disent finalement pas autre chose. En faisant de la rentabilité un moyen plutôt qu’une finalité, elles arrêtent de sacrifier leur compétitivité et le long terme à la rentabilité et au court terme, et deviennent même généralement plus rentables. Donnant raison aux philosophes stoïciens qui préconisaient de privilégier l’attention portée au telos (les moyens engagés) plutôt qu’au skopos (les finalités), de nombreux exemples parmi les partenaires de la chaire, et au-delà, l’illustrent à merveille.
1Dominique Steiler (2017), Osons la paix économique – De la pleine conscience au souci du bien commun, De Boeck, p. 184.
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