Devoir de vigilance : transformer une contrainte en opportunité
Patiemment élaborée après la catastrophe du Rana Plaza en avril 2013 (un immeuble abritant des ateliers de confection textile situé à Dacca au Bangladesh s’était effondré, entraînant la mort de plus de 1 000 personnes), la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordres est entrée en vigueur l’année dernière. Elle impose aux sociétés employant plus de 5 000 personnes en France (ou 10 000 personnes si le siège social se situe à l’étranger) d’élaborer un plan de vigilance (notamment fondé sur une cartographie des risques), de le mettre en œuvre et de le rendre public. Les 150 entreprises concernées apparaissent en retard sur l’objectif, puisqu’une étude récente de EY précise que 68 seulement ont rédigé un document préalable à la mise en oeuvre à deux mois de la fin de l’année. Les autres n’ont sans doute pas pris la mesure des intérêts cachés associés à la démarche.
Une obligation nouvelle vécue comme une contrainte coûteuse
Plusieurs voix, dont celle du patronat mais pas seulement, se sont rapidement élevées pour dénoncer une atteinte supplémentaire à la compétitivité de nos entreprises. Il est clair que la démarche génère immanquablement des coûts (cartographie des risques, procédures d’évaluation régulière de la situation des filiales, des sous-traitants ou des fournisseurs, mesures correctives…) et une source de distorsion de concurrence entre les grandes entreprises françaises et leurs concurrentes étrangères. Pour entendables qu’elles soient, les critiques exprimées s’avèrent peu pertinentes. L’obligation de vigilance vise avant tout à corriger certains manquements et abus et se veut d’abord une loi vertueuse. Le fait que de nombreux pays étudient aujourd’hui les possibilités d’adopter des mesures inspirées de la loi française montre que cette dernière s’inscrit dans le sens de l’évolution et tendra à réduire ses effets néfastes à court terme sur la compétitivité.
Des intérêts cachés faisant du devoir de vigilance une source d’opportunités
Au-delà de la relativisation des difficultés posées, le devoir de vigilance présente un intérêt majeur en termes de prise de conscience. Plusieurs entreprises en témoignent déjà, expliquant à quel point le fait de considérer l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement (et de valeur) plutôt que les seuls fournisseurs de rang 1 (comme on dit dans l’automobile) s’avère révélateur. À l’heure où les relations fournisseurs apparaissent plus que jamais de nature à faire la différence entre concurrents, cette prise de conscience est bienvenue. Habituées à traquer les “coûts cachés” associés aux choix réalisés, les entreprises mettent le doigt sur un intérêt caché de la vigilance (un de ceux dont on ne prend conscience qu’une fois la nouvelle pratique mise en œuvre) et, plus généralement, de l’attention portée aux fournisseurs et sous-traitants. Ces derniers s’avèrent en effet des partenaires centraux dans la capacité à créer de la valeur. Transformer des contraintes en opportunités est une part essentielle du travail de tout dirigeant, que sa structure appartienne au CAC 40, à la dernière génération de start-up, ou à des PME de tous secteurs. œuvrer davantage avec ses fournisseurs et sous-traitants est une bonne idée, valable bien au-delà des 150 grandes entreprises.
Infos clés
Les relations fournisseurs apparaissent plus que jamais de nature à faire la différence entre concurrents Montbonnot (Tarmac)
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