Concilier les impératifs de la crise énergétique avec ceux de la crise climatique

Pourquoi les prix de l’énergie flambent-ils dans de telles proportions ?

Le phénomène résulte de plusieurs facteurs, et d’une mauvaise concordance. En premier lieu, la reprise de la production mondiale, en sortie de Covid, a placé les prix des différentes sources d’énergie sous tension, sous l’effet d’une hausse de la demande, et de sous-investissements chroniques dans le secteur, par exemple dans le raffinage de pétrole. En Europe, le problème s’est doublé d’une forte dépendance, notamment au gaz russe, que l’Union s’empêche de consommer en solidarité avec l’Ukraine. La France connaît au même moment une indisponibilité record de son électricité nucléaire. Nous devenons importateurs nets, alors que la France était le premier exportateur d’électricité du continent pendant plusieurs décennies. À cela s’ajoute des conditions dégradées pour la production d’électricité renouvelable, par exemple à cause des épisodes de sécheresse. Les barrages de plusieurs pays sont à sec. Or l’hydroélectricité est la deuxième source d’électricité, après le nucléaire, en France. C’est cette accumulation qui fait grimper les prix sur tous les marchés, révélant à quel point les marges de manœuvre sont faibles en Europe. Elle fait aussi redouter des épisodes de black-out cet hiver…

Comment les éviter, et comment les entreprises peuvent-elles agir ?

À défaut d’avoir une influence décisive sur l’offre, les pouvoirs publics communiquent fortement sur une régulation par la demande. Selon l’étude rendue en septembre dernier par RTE, le risque de tension en France serait maîtrisable « grâce à une forte mobilisation en faveur d’actions de baisse de consommation ». Une réduction de la consommation nationale comprise entre 1 et 5 %, et jusqu’à 15 % dans l’hypothèse d’un hiver rigoureux, permettrait d’éviter les risques de coupure d’alimentation d’énergie. Ceci, bien sûr, en intégrant déjà les initiatives d’effacement – c’est-à-dire d’arrêt – de grandes entreprises électro-intensives. Le dispositif Ecowatt a été mis en place pour sensibiliser les Français, les entreprises, les collectivités, aux gestes efficaces, et les alerter si besoin. Mais c’est bien toute l’Europe qui se trouve placée face à une situation inédite. De façon brutale, certes, cela peut aussi être l’opportunité pour chaque acteur de faire coïncider les impératifs de la crise énergétique avec ceux de la crise climatique.

E. Ballery

Nous aurons besoin cet hiver d’une conscience collective autour de la sobriété énergétique pour éviter des situations de black-out.