Jean-François Clappaz, vice-président en charge de l’économie et du développement industriel de la communauté de communes Le Grésivaudan : "Reconstruire de l’industrie sur l’industrie"
Avec 48 zones d’activités, près de 8 000 entreprises pourvoyant plus de 36 000 emplois, dont 25 % dans l’industrie, le dynamisme du Grésivaudan n’est plus à démontrer. L’attractivité du territoire n’en reste pas moins limitée par la rareté des espaces disponibles. État des lieux, avec Jean-François Clappaz, vice-président en charge de l’économie et du développement industriel de la communauté de communes Le Grésivaudan.
Beaucoup de grands projets industriels sont nés et se développent encore sur votre territoire…
Oui, cela fait partie de nos forces. Des entreprises comme STMicroelectronics ou Soitec poursuivent leur extension, avec encore de très grands projets à venir entre 2024 et 2030. La zone des Fontaines, à Bernin, accueille l’un des plus grands investissements industriels français, mais aussi le projet de 8 Md€ qui s’inscrit dans un objectif de reconquête de souveraineté des semi-conducteurs au niveau européen. Sur cette même zone, Soitec a déjà ajouté une usine sur son site, sans augmenter sa consommation d’eau potable. Pour répondre là encore à la volonté de l’Europe d’être moins dépendante vis-à-vis du reste du monde, la communauté de communes travaille d’arrache-pied pour permettre une livraison des aménagements courant 2028. De façon plus générale, sur toutes nos zones économiques, nous accueillons des PME, des artisans, des industries de toute taille, dans l’objectif de diversifier les activités, les emplois et de préserver les grands équilibres du territoire.
Quels sont les projets de zones d’activités économiques, et quels aménagements retenez-vous ?
Le territoire est directement impacté par les nouveaux règlements d’urbanisme. Les risques d’inondation (PPRI), le plan de prévention des risques naturels (PPRN) et le décret digue de 2019, ont retiré plus de 50 ha d’espaces aménageables. Les règles du Zéro artificialisation nette (ZAN) renforcent encore un peu plus les contraintes. Sur le peu de foncier restant, il s’agit donc de procéder avec discernement et d’aménager autrement : on ne peut plus envisager les projets de la même façon qu’il y a 30 ans. Dans le prolongement d’Inovallée, nous travaillons sur la création de la zone de Secrétan, à Montbonnot-Saint-Martin, à proximité immédiate de l’échangeur de l’A41. Sur 10 ha, 4,5 ha seront aménagés pour accueillir de l’activité économique. Ici, nous travaillons sur la création de parkings silo, sur la verticalisation des bâtiments industriels, pour permettre aux entreprises de conserver l’essentiel du foncier pour leurs activités. De même, toutes les nouvelles zones d’activités sont dotées de règlements d’aménagement extrêmement exigeants en matière environnementale (certification BREEAM, géothermie, panneaux photovoltaïques…). Au nord du territoire, nous travaillons sur la création de la zone d’activités de Grignon, qui bénéficiera des mêmes exigences que pour Secrétan.
L’optimisation du foncier passe aussi par la réhabilitation des friches…
Oui, en milieu urbain, cela veut dire « construire la ville sur la ville ». Dans le Grésivaudan, nous avons pris le parti de créer de la nouvelle industrie sur l’ancienne. Sur les opérations de réhabilitation de friches, Le Grésivaudan s’est engagé avec une volonté politique forte (acquisition foncière, dépollution, aménagement, découpage parcellaire). C’est par exemple ce que nous avons réalisé sur l’ancienne friche de Moulin Vieux à Pontcharra. Mais nous participons aussi, dans le cadre de nos compétences, à l’aménagement de friches privées (Ascométal au Cheylas par exemple) qui devient, grâce à son nouveau propriétaire, un site à énergie positive. Il accueille des entreprises participant à la transformation de l’économie. Mais cela prend beaucoup de temps – dix ans au minimum - et présente un coût élevé – plus de 4 M€ de travaux de dépollution sur un budget global de travaux de 7 M€ sur la friche des anciennes papeteries Moulin-Vieux à Pontcharra.
Le Grésivaudan a été reconduit par l’État comme « Territoire d’industrie ». Tout concorde plutôt pour affirmer cette vocation…
C’est le paradoxe français : on prône la réindustrialisation, mais nous faisons face à un empilage de normes et de règlements qui entrave cette ambition. Les démarches environnementales sont au cœur des préoccupations des élus, jusque dans le choix des entreprises désireuses de s’implanter sur notre territoire. Nous accueillons d’ailleurs de très belles start-up positionnées sur les enjeux d’avenir qui ont choisi le Grésivaudan pour s’industrialiser : Vulkam, InjectPower… Nous soutenons par ailleurs, via le fonds d’investissement CoopVenture ou les pôles de compétitivité, les nouvelles activités en émergence. Mais il y a la loi, l’esprit de la loi, et des interprétations qui se situent bien au-delà de l’esprit de la loi. Les nouveaux enjeux industriels ne peuvent attendre !
E. Ballery
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