Aller au contenu principal
Management / Formation / RH - Accueil — Le 18 février 2025

Formation, emploi : encore des opportunités ?

Coup de froid sur la formation et l’emploi. Après une année 2024 marquée par de fortes turbulences, tant que les plans politiques qu’économiques, les mois à venir n’offrent ni perspectives claires, ni amélioration de la conjoncture. Sur le marché de l'emploi, les pénuries de compétences demeurent. Dans le même temps, les entreprises freinent leurs recrutements, ce qui entraîne une hausse du taux de chômage. Quant aux dotations de l’État en faveur de la formation, elles sont en net recul, obligeant les opérateurs à s’adapter et à innover. Jusqu’à quel point ? Des décisions prises au niveau national ou européen sont attendues et scrutées de près pour nourrir l’espoir d’une reprise.

© AdobeStock

Inquiétude et incertitude. Ces mots reflètent l'état d'esprit des entreprises et des acteurs de la formation. Cela fait plusieurs mois que des voyants sont passés à l’orange et même au rouge, en raison de facteurs structurels et conjoncturels. Les tensions géopolitiques, l’inflation grevant le pouvoir d’achat, l’instabilité politique, l’ampleur de la dette et des comptes publics en berne... sont autant de causes qui alimentent une atmosphère anxiogène et rendent l’avenir plus incertain. La Banque de France a d’ailleurs révisé à la baisse sa prévision de croissance pour 2025 à 0,9 %, contre 1,2 % initialement annoncée. Ce ralentissement de l'activité est le prolongement des tensions observées dès 2024. L’institution évoque ainsi une croissance nulle au quatrième trimestre 2024, après une légère hausse de l’activité sur la période précédente (+ 0,4 %), portée par les Jeux olympiques et paralympiques de Paris. En Auvergne-Rhône-Alpes, l’activité est à l’arrêt, constate la note de conjoncture régionale de l’Insee. Ses experts soulignent que l’économie est dans le "doute", avec une dynamique de l’emploi "grippée au troisième trimestre". Voire légèrement négative sur un an pour l’emploi privé (- 0,1%). "Les créations d’emplois sont inférieures à 10 000 pour la première fois depuis la reprise suivant la crise sanitaire." Les perspectives d’embauches des entreprises restent encore floues, avec des recrutements plus raisonnés que durant la période post-Covid. "En attendant un retour à la stabilité, les entreprises se concentrent sur l’absorption du volume de cadres embauchés lors des dernières années", remarque Michel Fuchs, responsable du centre de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) de Grenoble

Un chômage à 8 % en 2025 

Autre indicateur scruté, le chômage. Tandis qu’il était en baisse au 3e trimestre 2024, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A (tenus de chercher un emploi) en Isère connaît une hausse de 4,2 % au 4e trimestre 2024 (1 960 personnes supplémentaires inscrits, soit 48 560 au total). Dans ce contexte, les mois à venir alimentent l’inquiétude. Les défaillances d’entreprises s’envolent (+ 9 % dans le département entre janvier et septembre 2024), même si le nombre de faillites avait drastiquement chuté en période post-Covid. À cela s’ajoutent des redressements judiciaires et une montée des plans sociaux (la CGT évoque 250 plans en préparation à l’échelle nationale), à l'image des difficultés rencontrées par des entreprises structurantes comme Vencorex ou Arkema. Autant d’éléments conduisant l’OFCE à prévoir un taux de chômage se rapprochant de 8 %, fin 2025, dans l’Hexagone (contre 7,4 % actuellement). Malgré la nomination d'un gouvernement le 23 décembre, le manque de visibilité et l'absence de cap budgétaire ont durablement fragilisé le monde du travail et de l’entreprise. Et percute immanquablement les acteurs de la formation continue et de l'apprentissage. Placés dans l'expectative, l’ensemble des acteurs freinent leurs décisions et leurs investissements. 

Coup de rabot sur l’apprentissage 

Les restrictions budgétaires imposées à France Compétences pourraient avoir des conséquences significatives sur les opérateurs de formation et les centres d’apprentissage. Avec un budget de 13,651 Md€ pour 2025 et un déficit réduit à 466 M€, l'organisme chargé de financer, contrôler et réguler la formation continue et l’apprentissage mise sur une augmentation des contributions des entreprises pour compenser la baisse des financements de l'État, initialement prévue à 500 M€ dans le projet de loi de finances. Dans cette situation, le volet apprentissage connaîtra un coup de rabot important. "CFA, entreprises et apprentis seront concernés par les coupes budgétaires", prévenait Fouzi Fethi, responsable du pôle droit et politiques de formation chez Centre Inffo, lors d’un rendez-vous de veille juridique et stratégique, le 12 décembre. Ainsi, l’enveloppe a été fixée à 9,7 Md€, soit une baisse de 1 Md€ par rapport à l’an passé. L'aide attribuée aux employeurs d'apprentis est l’une des sources d’économie. Au 1er janvier 2025, le dispositif de 6 000 € octroyé pour toute entreprise qui embauchait un apprenti a pris fin, ce qui aura tout de même permis d’augmenter le nombre de contrats de 856 100 en 2021 à plus d’1 million fin 2023, date de sa mise en place. Les aides sont maintenues, mais abaissées à 5 000 € pour les PME et 2 000 € pour les entreprises de plus de 250 salariés. Une révision pour laquelle les opérateurs de l’apprentissage redoutent des répercussions sur leur modèle économique. "Cela imputera 10 % de nos recettes", précise Thomas Viron. Le directeur du Groupe Formation, qui regroupe notamment le Campus de l’alternance, n’entend pas demander le reste à charge aux entreprises, préférant ajuster son budget en réalisant des économies ici et là. "L’équation n’est pas simple et en 2025, nous serons à la limite de l’exercice. Car si nous sommes à l’équilibre, nous n’aurons plus de capacité d’autofinancement pour investir", prévient-il. Vice-président de l’Université Grenoble Alpes, Marc Oddon s’interroge lui aussi sur le bien-fondé de la mesure : "La gestion de la prise en charge de l’apprentissage est un élément clé de notre dispositif. Le manque de financement peut avoir des impacts sur notre modèle", lance le responsable de la formation continue et de l’apprentissage. L’établissement propose 120 diplômes en apprentissage. 

La formation continue sort-elle du lot ? 

Si le paysage est chamboulé, certains acteurs de la formation continue explorent des pistes de développement. À CCI Formation, "85 % du chiffre d’affaires" provient de formations commandées par les entreprises. "À chaque nouveau gouvernement, la formation professionnelle ressort comme une variable d’ajustement. Nous constatons pourtant tout l’intérêt des entreprises à former leurs salariés, quelle que soit la période. Pour l’heure, nous n’enregistrons pas de diminution de la demande, précise Géraldine Soto-Giroud, sa directrice. C’est pourquoi notre choix stratégique est d’investir largement sur cet axe." À l’image de l’Université grenobloise, avec des formations axées sur des blocs de compétences en cybersécurité, santé ou droit, entre autres. "Nous abordons tout de même 2025 avec espoir, puisque notre mission est d’accompagner les nouveaux métiers, ce que permet précisément la formation tout au long de la vie", souligne Marc Oddon. Si la crise est moins aiguë sur ce champ, elle laisse toutefois place à des interrogations pour ces organismes dont le modèle repose principalement sur des formations éligibles au CPF. Un dispositif dont le budget passerait en dessous des 2 Md€ en 2025. 

Trouver des marges de manœuvre 

Dans un contexte global d’incertitude, la capacité d’adaptation devient une condition sine qua non pour garantir la pérennité des organismes de formation. Ils doivent se réinventer afin de répondre aux défis de secteurs en pleine mutation et à l’émergence de compétences inédites. "Sur nos marchés, les axes de développement sont limités, ce qui nous oblige à concentrer nos efforts sur les produits. Peut-être referons-nous du conseil aux entreprises, avance Géraldine Soto-Giroud. Par ailleurs, nous croyons fermement à la Préparation opérationnelle à l’emploi, un dispositif de formation de France Travail qui permet de préparer un candidat à sa prise de poste." Au Campus de l’alternance, les marges de manœuvre "se situent dans la création de nouvelles formations, de nouveaux titres professionnels. Et dans le futur, dans des modules d’apprentissage plus courts d’un an au lieu de deux", imagine Thomas Viron. Des leviers de dynamiques "toujours" calculés en adéquation avec les besoins en compétences des entreprises et des territoires.

R. Charbonnier

Les métiers qui recrutent en Isère en 2025

À partir de la consultation des données issues des enquêtes de France Travail et de l’Apec, l’année 2025 devrait afficher des tendances de recrutements relativement stables à celles de 2024 dans le département. Les métiers de la comptabilité, de la préparation de commande, du développement informatique, d’assistant de vie et de maintenance d’équipements industriels, seront toujours très demandés. Chez les cadres, les professionnels du développement informatique sont les profils les plus recherchés, les deux principaux secteurs recruteurs étant les activités d'ingénierie et le conseil en systèmes et logiciels informatiques. Les fonctions commerciale, marketing, R&D et production industrielle suivent.

Les nouvelles règles de l’assurance chômage

Après la signature, le 14 novembre dernier, d’un avenant au "protocole d’accord" en date du 10 novembre 2023 relatif à l’assurance chômage, de nouvelles mesures sont entrées en vigueur au 1er janvier 2025, pour une période de 4 ans. D’autres s’appliqueront à partir de ce printemps. Ces règles doivent "permettre de générer annuellement 400 M€ d’économies supplémentaires". Parmi les plus importantes : un nouveau calcul de l’allocation chômage, autrement dit le salaire journalier de référence (SJR). S’il prend en compte les jours travaillés et ceux non travaillés entre le 1er jour du premier contrat et le dernier jour du dernier contrat de cette période, le plafond des jours non travaillés pris en compte pour son calcul est de 75 % du nombre de jours travaillés dans la période de référence. À compter du 1er avril, celui-ci affichera un taux de 70 %. De plus, deux profils de chômeurs sont particulièrement ciblés par les évolutions de l’assurance chômage : les travailleurs saisonniers et les seniors. Les premiers devront avoir travaillé au moins 5 mois au cours des 24 derniers mois pour obtenir une indemnisation (au lieu de 6). Pour les seconds, un décalage de deux ans s’opère afin qu’ils puissent bénéficier d’une indemnisation (55 ans au lieu de 53 ans par exemple, pour avoir droit à 22,5 mois d’indemnisation maximum). 

Chiffres clés de la formation

Objectif des formations des demandeurs d’emploi en Isère

61 % des personnes formées retrouvent un emploi dans les six mois suivant leur formation

63 % des femmes ont été formées en vue d’obtenir une certification

18 % des hommes demandeurs d’emploi ont souhaité élargir leurs compétences

4 % des femmes ont été formées pour créer leur entreprise

(France Travail, 3e trimestre 2023)

L’apprentissage

15 567 contrats d’apprentissage ont démarré en 2023, en Isère

62 % des apprentis en France préparent des formations de bac +2 ou plus, 32 % des titres professionnels (vendeur en magasin, employé commercial, conducteur routier, etc.)

43 % des contrats débutés sont signés dans des entreprises de moins de 10 salariés, en France

21 % des contrats d’apprentissage commencés en 2022, dans l’Hexagone, ont été rompus au cours de leur neuf premiers mois d’exécution

Sources : Dares, 4 décembre 2024 ; Ministère du Travail, 2023

 

Les chiffres de l'emploi

+ 4 %, la hausse du nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A (tenus de chercher un emploi et sans activité), en France, inscrits à France Travail au quatrième trimestre 2024 par rapport à la période précédente. 

+ 2 % en Auvergne-Rhône-Alpes, 

+ 4,2 % en Isère (soit 1 960 personnes de plus).


Évolution des demandeurs d’emploi de moins de 25 ans en 2024 :

+ 5,3 % en catégorie A, B, C en Auvergne-Rhône-Alpes, 

+ 7 % en Isère.


Évolution des motifs d’inscription à France Travail (catégories A, B, C), en région AURA, en 2024 :

Fin de contrat :  - 1,9 %

Fin de mission d’intérim : - 13,2 %

Démission : - 4,5 %

Licenciement économique : + 27,4 %

Retour d’inactivité : -15,7 %

Source : France Travail-Dares, STMT, traitements Dares.


Les recrutements :

110 760 embauches ont été enregistrées au second trimestre 2024, dont 59 980 sur le bassin grenoblois.

29 % des établissements ont prévu de recruter en 2024 (soit - 14 % par rapport à 2023)

Évolution de l’emploi salarié en Isère :*

498 680 salariés au 3ème trimestre 2024 (+ 0,2 %). 

Emploi salarié en recul de -1,4 % dans la construction sur un an, de - 6,9 % pour l’intérim.

Indemnisation chômage :

1 340 euros brut, le montant mensuel moyen du droit d’allocation chômage pour un demandeur d’emploi en Auvergne-Rhône-Alpes. Le montant est de 1 290 euros en Isère (à fin décembre 2023).

Source : France Travail, janvier 2025
 

Les cadres 

464 760 cadres sont recensés en région AURA en 2023

37 290 cadres ont été recrutés en 2023 (AURA)

81 140 cadres travaillent en Isère

22 % des cadres travaillent dans l’industrie (hors construction), en Isère

Source : APEC, décembre 2023 (derniers chiffres connus) 

Commentaires

Ajouter un commentaire

Langue
La langue du commentaire.
Votre commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang class title aria-label> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id> <span class> <div class>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
Email
Merci de saisir votre adresse email
Nom
Merci de saisir votre nom
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.
Leave this field blank

A lire aussi

Suivez-nous

Abonnez-vous

Abonnez-vous à nos newsletters S'abonner