Pierre Huillier, président de Groupe Huillier
« Pour les professionnels, il n’existe pas encore d’orientations claires sur les choix de motorisation »
Comment se déroule la transition vers la décarbonation pour les poids lourds ?
Pour faire simple, il existe deux catégories dans ce domaine : le transport de marchandises et le BTP. Concernant la première, des efforts sont plutôt faits en direction du GNV (Gaz naturel véhicule), obtenu par méthanisation, moins polluant et d’un prix à la pompe sensiblement moins important que les autres carburants. Mais les coûts à l’achat des porteurs sont beaucoup plus élevés. Pour la seconde, il faut admettre que les offres ne sont pas matures. L’hydrogène n’est pas encore d’actualité (pour Mercedes, la production est annoncée pour 2027) et l’électricité pose le double problème de l’autonomie et du prix : un véhicule diesel coûte 120 k€, un électrique représente un investissement de 250 à 300 k€, pour des rendements moindres.
Faut-il en conclure que nous sommes au point mort ?
D’abord, je suis étonné que les constructeurs européens n’aient pas adopté la même politique industrielle. Nous sommes pourtant dans l’urgence : des marques chinoises commencent à conclure des partenariats avec des concessionnaires français… On ne peut que constater que les acteurs continentaux ont la volonté d’aller de l’avant. Mais il faut leur laisser le temps de s’adapter aux différents modes de transport, par exemple pour mettre au point un véhicule à hydrogène dont l’autonomie atteindrait au moins 1 000 km, ou pour accomplir des avancées sur le terrain de l’électrique et faire davantage que les 300 km actuels d’autonomie. Dans un tel contexte, nombreux sont ceux qui pensent que nous allons rouler au thermique encore longtemps. Notons que les véhicules récents émettent beaucoup moins de particules fines.
Qu’en est-il des utilisateurs ?
Dans l’agglomération grenobloise, les petites entreprises du BTP sont très nombreuses. Les dérogations sont courantes et incontournables pour rouler au sein de la ZFE, d’autant que certains artisans habitent en ville. Il est possible de percevoir des aides de l’État et de la Métropole, mais les professionnels se posent des questions : un camion porteur de benne s’amortit en 10 ans. Il ne faut donc pas se tromper sur la solution choisie. Nous avons tous la volonté de rouler au décarboné, mais les solutions technologiques ont pris beaucoup de retard. Et il n’existe pas véritablement d’orientations claires quant au choix des motorisations.
P. Napoetano
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