Immobilier dans la région grenobloise : une étape charnière ?
Le secteur de l’immobilier dans la région grenobloise a confirmé sa vigueur en 2017, même s’il n’atteint pas les niveaux records de plusieurs métropoles françaises. Des programmes ambitieux dans la ville-centre et en périphérie confortent la dynamique en ce début d’année. Le contexte économique devrait encourager les comportements d’achat tout au long de 2018, si certaines décisions nationales et les enjeux locaux d’aménagement ne viennent pas jouer les trouble-fête.
Avec plus de 986 000 transactions réalisées en France, 2017 s’inscrit comme une année record pour l’immobilier ancien. Elle marque une nouvelle hausse de 16 % par rapport à 2016, déjà très dynamique, bien loin des maigres 594 000 ventes de 2009. Cette frénésie pour la pierre profite à l’ensemble des villes françaises, à des degrés divers. Des métropoles comme Bordeaux, Lyon, Nantes, Montpellier ou Lille prennent la tête du peloton. Et chez nous ?
Un marché de l’immobilier contrasté mais confiant
“Grenoble, heureusement, n’a pas échappé au phénomène de hausse du volume de transactions observé en France en 2017. Mais sa progression n’est que de 9 %”, pointe Jean-Marc Torrollion. Le nouveau président de la FNAIM, élu en novembre dernier par les grands présidents de la fédération, souligne également une quasi-stabilité des prix dans la capitale des Alpes. Ce que confirment les notaires : “À 2 210 euros le mètre carré, le prix de l’ancien a marqué une petite hausse de 1,9 % en 2017. C’est bien moins que la moyenne nationale, à environ 5,1 %”, observe maître Gabriel Nallet, notaire à Grenoble. Quatrième ville dans le classement national en termes de prix en 2007, Grenoble est reléguée en onzième position dix ans plus tard. “C’est un sujet d’inquiétude relatif, qui sous-tend une baisse de l’attractivité économique. Grenoble doit reconquérir son image de métropole dynamique en donnant des signes forts d’embellissement et d’accueil des entreprises”, renchérit Jean-Marc Torrollion. Grenoble, à l’inverse d’une métropole comme Bordeaux, reste aussi pénalisée par la qualité de ses infrastructures, notamment ferroviaires : “La ligne TGV Paris-Arcachon a certainement contribué à faire flamber les prix à Bordeaux, qui bénéficie en outre d’un cadre de vie envié, suite à d’importants programmes de requalification”, commente maître Nallet, à propos de la hausse de plus de 12 % du prix du mètre carré dans la préfecture de la Gironde l’an passé.
L’hypercentre garde la cote
En ce début d’année 2018, les vendeurs à Grenoble se feraient un peu plus rares. “Rien de grave, mais on constate une petite baisse de l’activité suite aux forts volumes de ventes de l’an passé. Les stocks se sont forcément un peu réduits”, évoque Quentin Raffray, responsable d’agence au sein du réseau Square Habitat, à Grenoble. Face à cette pénurie relative de vendeurs, des acquéreurs de plus en plus avertis savent précisément ce qu’ils veulent. Aussi la demande se concentre-t-elle sur les biens d’architecture et les quartiers patrimoniaux : les beaux volumes et les planchers d’époque dans les bâtiments haussmanniens (construits entre 1852 et 1870) restent plébiscités. À l’inverse, vendre un bien des années 1960-1970 doté d’un plan courant et mal isolé, même s’il bénéficie d’un bon emplacement, relève de la gageure, à moins d’un gros effort sur les prix. Les immeubles de six étages sans ascenseur et nécessitant un ravalement sont largement boudés. D’où une forte disparité d’un quartier à l’autre de Grenoble : “Sur les grands boulevards, on est entre 2 000 et 2 200 euros le mètre carré, alors que dans le centre-ville, c’est actuellement 2 800 à 3 000 euros pour des biens à rénover”, souligne Quentin Raffray. Aux deux extrémités, la Villeneuve stagne début 2018 à moins de 1 000 euros le mètre carré, tandis que dans les immeubles hausmanniens de l’hypercentre, il peut atteindre 4 500 euros sans travaux à prévoir, selon Square Habitat. Cette focalisation sur le bel ancien rend délicate l’appréciation du marché par quartiers, ceux-ci offrant un visage de plus en plus hétérogène. Les disparités grandissantes de qualité des prestations peuvent même entraîner une différence de prix importante entre deux copropriétés côte à côte. “Comme rue Gabriel-Péri, où l’on observe un mètre carré à plus de 1 000 euros d’écart d’un numéro à l’autre de la rue”, précise-t-on à Square Habitat. Une situation qui conforte le rôle pédagogique des professionnels, aussi bien pour les vendeurs qu’en direction des acquéreurs.
L’intérêt des investisseurs
Ce tableau tout en contrastes peut-il compromettre l’avenir de l’immobilier à Grenoble ? Les professionnels ne partagent pas le même avis. Pascale Sedelac, dirigeante de Sedelac Immobilier, craint une dépréciation avec un effet tache d’huile, “au moins dans les secteurs proches des zones sensibles de la ville, mais aussi dans l’hypercentre, suite aux dégradations ressenties”. D’autres agents immobiliers refusent le Grenoble bashing. “Contrairement à ce que certains médias se sont empressés de dire, la situation de l’immobilier reste bonne à Grenoble”, défend Quentin Raffray. Un indicateur fiable de la santé du marché : l’intérêt des investisseurs. “Ils ont été deux fois plus importants dans le nombre de ventes réalisées en 2017. Et l’on constate aussi le retour des primo-investisseurs depuis l’an passé.” Des prix quasi stables à la vente, des loyers en légère hausse et des taux bancaires toujours très bas font que des biens dans l’ancien réussissent à s’autofinancer, s’ils sont de bonne qualité. “Tous comptes faits, la rentabilité nette de telles opérations atteint 4 à 5 % avant impôt, ce qui est supérieur à l’assurance-vie aujourd’hui”, observent les acteurs du marché. La dépréciation de certains types de biens, notamment dans les quartiers situés au sud des grands boulevards (Eaux-Claires excepté) peut aussi contribuer à attirer de nouveaux acquéreurs. C’est en tout cas ce que veut croire Sylvain Bricard, dirigeant du cabinet de courtage Courtier & Prêt, rue Lamartine à Grenoble : “Tout le monde ici peut s’y retrouver, quel que soit son budget. La grande diversité des biens et des prix est propre à rassurer les jeunes primo-accédants. Une ville trop chère les pénalise. Or, une part toujours plus grande de Français rêvent d’être propriétaires de leur logement.”
R. Gonzalez
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