Sport : la filière qui monte en Isère
En accueillant une dizaine d’événements sportifs majeurs d’ici à juillet 2019, Grenoble confirme son image d’étape incontournable du sport. Un dynamisme que l’on retrouve toute l’année avec des rendez-vous réguliers, assurant de solides retombées pour le territoire. La région grenobloise est aussi riche d’un écosystème et d’entreprises championnes, actives à l’échelle locale, et brillant à l’international.
Avec son image de ville sportive, les JO de 1968, ses grands clubs qui remontent dans les classements et la présence de nombreux équipementiers, Grenoble occupe une place singulière dans le sport français. Associé au secteur des loisirs de montagne, le secteur compte 870 entreprises, 5 600 salariés, et a connu une croissance de 12 % entre 2010 et 2017. Le dynamisme local se mesure notamment au nombre d’événements sportifs majeurs prévus d’ici à juillet 2019 : Coupe Icare, Internationaux de France de patinage artistique, Foulée blanche, Championnat du monde de hockey sur glace, courses cyclistes, l’UT4M et, cerise sur le gâteau, cinq matchs du Championnat du monde de football féminin.
Le poids des compétitions internationales
Des manifestations qui devraient booster l’attractivité du territoire et offrir de belles retombées économiques aux entreprises, notamment de l’hôtellerie-restauration. Directeur de trois hôtels sous franchise AccorHotels, le Mercure Président, le Novotel de Voreppe et l’Ibis de Gières (CA 2017 : 7 M€, 120 salariés), Nicolas Plékan affiche déjà complet pour les grandes manifestations à Grenoble, le fruit de sa politique de partenariats noués avec les grands clubs grenoblois (FCG, GF38 et BDL) : “Avec nos vastes salons et notre espace détente, nous avons pu être choisis par la Fifa à l’occasion du Mondial féminin 2019. Nos chambres seront occupées par des athlètes, leurs équipes et des spectateurs. De bon augure pour les hôtels grenoblois, qui disposent d’une solide clientèle d’affaires en semaine, mais pas encore de loisirs.”
Le dynamisme des clubs
Ces grands rendez-vous internationaux d’une année exceptionnelle ne doivent pas faire d’ombre aux événements réguliers de Grenoble, eux aussi source de revenus pour la région grenobloise. Avec le retour du FCG dans le Top 14 de rugby et celui du GF38 en Ligue 2 de football, les clubs, qui partagent désormais le Stade des Alpes (la pelouse la plus utilisée de France !), espèrent voir le nombre d’abonnés augmenter. Le FCG (CA : 18 M€, 18 salariés, 37 joueurs sous contrat), fort de 250 partenariats avec les entreprises grenobloises (sur 350 au total) mise sur l’engouement actuel vis-à-vis du rugby pour remplir les tribunes (la billetterie a généré 2 M€ la saison dernière). Et FCG Events organise chaque année une vingtaine de séminaires de team building au stade Lesdiguières, qui lui rapportent environ 100 k€.
Avec ses 9 salariés, son équipe de football, son staff médical, et un budget de 10 millions d’euros, le GF38 revient en force sur le devant de la scène. En quête d’identité dans un département qui compte 35 000 footballeurs licenciés, le club mobilise : “Nous venons de créer Go Foot, une entreprise dont 35 de nos partenaires sont actionnaires. C’est valorisant pour nous et utile au club pour prendre le pouls du territoire”, explique Max Marty, manager général du club. Une vitalité des grands sports d’équipe qui devrait booster l’activité business dans les loges du Stade des Alpes : près de 800 VIP y ont d’ores et déjà réservé leur abonnement pour cette saison.
Le sport, vecteur d’influence
À Pôle Sud, la patinoire la plus fréquentée de France (100 000 visiteurs par an), les Brûleurs de loups ont aussi développé une florissante activité de location de la salle, de team building ou lancements de produits (une manifestation par semaine), qui a rapporté 800 k€ en 2017. Des liens entre sport et entreprises que l’on retrouve également de façon informelle lors des événements du Cercle 1892. Ce réseau grenoblois de 100 chefs d’entreprise ou décideurs, partenaires de clubs sportifs ou d’athlètes, se réunit plusieurs fois par an. “On sort un peu le business des loges, en rapprochant sport et entreprise, mais sans lien commercial, note son président, Hervé Senebier. Nos adhérents sont libres d’accompagner n’importe quel athlète ou club, comme un jeune biathlonien que quelques centaines d’euros seulement peuvent aider lors d’une saison.” L’association, qui s’est mobilisée il y a dix ans pour sauver financièrement le FCG, s’est ouverte aux autres sports, avec pour idée de faire découvrir des disciplines et des décideurs. “Après, ils sont libres d’y retourner pour le business”, précise Hervé Senebier.
Des rendez-vous outdoor à succès
Le secteur des sports outdoor, avec une croissance de 2,6 % en Europe de 2015 à 2017, et de 5 % en Auvergne-Rhône-Alpes (3,6 Md€ de chiffre d’affaires en 2017), assure également des retombées importantes sur les territoires. Ses manifestations sont plébiscitées, telle la Coupe Icare, en septembre, le plus grand événement d’Auvergne- Rhône-Alpes en fréquentation (90 000 personnes en quatre jours, en 2017, entre Saint-Hilaire-du-Touvet et Lumbin), qui se distingue en outre comme le premier rendez-vous mondial du vol libre. Son succès illustre celui de l’activité parapente sur le plateau des Petites-Roches. L’école Prévol (CA 2017 : 300 k€, 2 salariés et 15 moniteurs indépendants), “dirige les 400 stagiaires vers les structures d’hébergement et les restaurants, précise l’un des associés, Olivier Muzet. Cela fait vivre une partie du plateau”. Autre spot grenoblois, Autrans-Méaudre accueille chaque année la Foulée blanche, deuxième course de ski nordique française. En janvier dernier, avec 8 000 participants sur quatre jours, elle a rempli toutes les chambres du plateau des Quatre- Montagnes. “Une aubaine pour les commerces du territoire, puisque 25 % des dépenses des participants leur reviennent”, assure Michèle Arnaud, présidente de l’association La Foulée blanche (1 salarié, 400 k€ de budget). Des retombées que l’on retrouve également en Oisans, “capitale mondiale du cyclisme”, aux nombreuses courses de légende. Ici, la démarche est encore plus concertée, car 56 % des visiteurs estivaux y pratiquent le vélo. Le cycling lab créé par la communauté de communes fédère les acteurs professionnels (commerces, hébergeurs, organisateurs de courses…) “pour se rapprocher le plus possible des volumes du ski. Les grands événements comme le Tour de France, Mégavalanche, Marmotte… nous aident beaucoup”, remarque son chargé de mission, Antonin Uvietta. Sachant qu’un cyclotouriste visiteur à la journée dépense 36 % de plus qu’un visiteur lambda, on comprend l’attention qui leur est portée en Oisans. “C’est une clientèle qui se fait plaisir, notamment dans les restaurants”, analyse Antonin Uvietta.
Des entreprises leaders de l’écosystème
À cette activité liée à la pratique sur le territoire s’ajoute le dynamisme d’un véritable écosystème du sport. Représentant un quart des effectifs de la filière, les industriels grenoblois entretiennent des liens forts avec les acteurs locaux. Le numéro un mondial du ski, Rossignol, à Saint-Jean-de-Moirans (CA 2017 : 345 M€, 1 400 salariés, dont 510 en Isère) poursuit sa diversification après le rachat de Time et de Felt (vélos haut de gamme, à Voreppe, 43 salariés) et, en 2017, de Raidlight. Cet équipementier de trail (45 salariés), à Saint-Pierre-de-Chartreuse, propose aux sportifs de tester les produits directement au départ de leur station de trail, et de profiter ainsi de leur retour d’expérience, pour une discipline qui a le vent en poupe. On retrouve aussi l’ancrage de Rossignol dans son partenariat noué avec le syndicat national des moniteurs de ski, dont le siège est à Meylan, pour habiller les hommes en rouge. Et aussi dans celui signé récemment avec son voisin Poma pour équiper dès cet automne ses équipes en textile.
Autre champion grenoblois, Petzl, l’un des leaders mondiaux des harnais de sécurité, du matériel d’escalade et de spéléologie. Il réalise 85 % de son chiffre d’affaires (CA : 185 M€, 500 salariés en Isère) à l’étranger, grâce à sa politique d’innovation constante, comme ses casques ultralégers ou sa lampe frontale FacetoFace, qui n’éblouit pas.
De l’amont à l’aval, de nombreuses activités représentées
Côté distribution, Go Sport (CA : 1 Md€, 295 salariés à Sassenage), poursuit son développement à l’international, avec 17 ouvertures de magasins à l’étranger l’an dernier, et projette de faire passer l’export de 8 à 25 % de l’activité d’ici 2020. Les PME et start-up liées au sport sur le bassin grenoblois assurent la vitalité du secteur avec des champions comme Entre-Prises (escalade), G-Tech (trail et marche nordique), mais aussi Full Time. Cette agence conseil en marketing (CA : 550 k€ euros, 4 salariés) déploie dans toute la France son savoir-faire, “sans lien avec les fédérations, contrairement aux principales régies publicitaires, précise Antoine Fournier, le président fondateur. Nous aidons les PME à choisir une stratégie pour rapprocher leur marque des consommateurs par le sport”. Une indépendance qui lui a valu d’être choisi par le Grand Prix France de F1 pour revoir sa stratégie de communication. Enfin, l’écosystème grenoblois bénéficie de filières de reconversion de sportifs de haut niveau. À GEM, 200 personnes l’ont suivi, “des profils extraordinaires, ayant déjà eu plusieurs vies, et très recherchés par les employeurs”, note François Leccia, responsable du programme.
La Brunerie, autre spot majeur
Pôle sportif unique en Isère, le campus de la Brunerie, à Voiron, associe sport de haut niveau (Creps, pôle olympique d’escalade, internationaux de badminton…) et activité économique. Né sous l’impulsion du Pays voironnais, Inolab, quatre bâtiments de 2 500 m2, abrite une quinzaine d’entreprises du secteur, dont des start-up sur une nouvelle pépinière dédiée de 500 m2. Des appareils de fitness (NetQuattro) au parcours d’accrobranche (Prisme Techfun), en passant naturellement par l’escalade. À côté du pionnier des chaussons d’escalade EB, et de 9A Climbing, la société ABK (CA 2017 : 1,2 M€, 6 salariés) affiche de belles performances. Fondée par d’anciens compétiteurs ayant fréquenté le Creps, elle réalise 20 % de croissance par an et est présente dans 12 pays. Son créneau : “Des vêtements techniques avec l’esprit lifestyle et les couleurs du surfwear, explique le PDG, Hugo Allard. L’environnement de la Brunerie et des locaux tout neufs nous ont aidés à nous développer !” Les entreprises du campus bénéficient aussi du living lab du Pays voironnais, qui a signé une convention avec l’UGA pour mettre à disposition un atelier de prototypage textile, “car certaines n’ont pas les moyens de tester leurs produits ici avant l’usine”, explique Dominique Rillh, directeur de projet au service économique du Pays voironnais. Enfin, c’est aussi à la Brunerie que se tient chaque année Inosport, le premier salon de France sur le sport et l’innovation, qui, avec Mountain Planet à Grenoble, offre un aperçu global du sport de demain. Parmi les entreprises lauréates en 2018, les Iséroises Moovlab (voir encadré) ou Wens (gants de rééducation) ont été présentées aux 350 visiteurs et professionnels à l’affût de nouvelles pépites lors du salon en juin.
F. Baert
Solutions CCI
Les rencontres du Club Euro Alpin
Le Club Euro Alpin, animé par la CCI de Grenoble, a pour mission de fédérer les acteurs du sport et de la montagne. La dernière rencontre du Club portant sur la filière outdoor en Isère a réuni, le 4 juillet, 50 professionnels à la CCI. Contact : francis.fiesinger@grenoble.cci.fr - 04 76 28 29 55
Les chiffres clés du sport
• Marché du sport en France : 38,1 Md€. • Effectif du secteur : 124 000 personnes. • 5 600 salariés en Isère dans 870 entreprises, et 12 % de croissance entre 2000 et 2017 (+ 600 emplois). • 500 000 licenciés dans des clubs sportifs en Isère répartis dans 3 000 clubs. |
OSV, un cluster au service de la filière
Plus grand cluster d’Europe pour les entreprises de l’outdoor, avec plus de 400 membres, Outdoor Sport Valley (OSV) vise à contribuer au développement économique des entreprises de la filière. Quarante sociétés iséroises (Rossignol, Petzl, Furlan Snowbard, Origin Clothing) sont adhérentes à cette association basée à Annecy. “Nous menons surtout des actions de proximité, explique sa directrice, Anne Schott, avec le parrainage de petites entreprises, du conseil auprès des collectivités, et la mise en relation avec les acteurs du secteur, qui se retrouvent sur les salons. Souvent, l’entrepreneur est au départ un sportif qui a identifié un besoin. Nous l’aidons dans la phase de lancement et de commercialisation du produit.” |
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