MadaM… est servie
Une nouvelle table, qui affiche joliment ses ambitions.
Dans la compétition qui voit des chefs de talent rivaliser d’efforts pour donner à Grenoble l’étoile qui lui fait inexplicablement défaut, voici qu’un nouvel astre se présente, Yann Tanneau, lequel a d’emblée de belles cartes à faire valoir. Un cadre, d’abord : ce “MadaM” en forme de palindrome, qui a perdu son e final pour manifester son esprit émancipé et qui a investi une des plus belles villas Art déco de la ville, en plein centre, à l’emplacement de l’ancienne clinique des Bains de la rue Thiers, en lui redonnant par la décoration toute son élégance Belle Époque. Et surtout un itinéraire culinaire qui offre de solides références : dans la ligne des Ducasse et des Senderens, passé par des maisons prestigieuses, complice de Christophe Aribert à l’Opéra Garnier et, pour couronner le tout, Gault & Millau d’or en 2012, Yann Tanneau, après avoir pris l’air de la montagne en travaillant sur une ligne de restauration en stations, a eu envie de revenir à un vrai projet gastronomique. L’occasion lui en a été fournie par le groupe Gourmet Conception qui était désireux de tenter l’aventure grenobloise, en investissant dans un projet porteur. Et MadaM en est assurément un.
Raffiné sans chichi, savoureux sans esbroufe
Car le chef entend, de fait, offrir une cuisine haut de gamme, mais accessible, ce qui se traduit par des prix (de 32 à 89 €) abordables eu égard au standing de la table. S’il a décidé de travailler au plus près des producteurs locaux, fidèle à ses origines bretonnes, il veut aussi mettre l’accent sur les produits de la mer. Ayant opté pour une carte qui renouvelle chaque semaine une ou deux propositions afin d’offrir un roulement permanent, il a déjà choisi ce qu’il compte proposer dans les mois qui viennent : les saint-jacques, les cigales de mer, les truffes, les champignons, les cardons, le gibier, le caviar de Sologne… Pour l’heure, on a apprécié comme il se devait un homard bleu légèrement poché et rôti à l’huile de noix, subtilement servi avec œuf bio crémeux et petits champignons, avant de passer à une selle d’agneau juste rosée, accompagnée de cocos de Paimpol et fleurant bon l’ail violet, la sarriette et l’estragon. Et de terminer par un chocolat parfumé au yuzu avec espuma de chartreuse et sorbet à la faisselle : raffiné sans chichi, savoureux sans esbroufe. Comme, pour accompagner le tout, le verre de viognier ardéchois de Louis Chèze et le côtes-du-rhône méridional de Stéphane Ogier. De quoi mettre des étoiles dans la bouche, en attendant qu’elles arrivent, un jour ou l’autre, à la table.
J. Serroy
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