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Services - Accueil — Le 19 février 2025

L’immobilier d’entreprise à la recherche d’un second souffle

Si les tendances de l’immobilier d’entreprise traduisent les mutations du monde du travail, elles reflètent aussi la conjoncture économique nationale, les évolutions réglementaires et les contraintes locales. Dans la région grenobloise, une offre très qualitative de bureaux neufs excède désormais la demande, tandis que les nouveaux projets d’implantations industrielles peinent à se concrétiser, faute de foncier disponible. Comment l’immobilier d’entreprise peut-il rebondir en 2025 dans ce contexte incertain ? Tertiaire, locaux d’activités, commerces : les professionnels grenoblois du secteur font le bilan de l’année écoulée et tracent les perspectives d’un marché en demi-teinte.

Perspectives de bâtiments Hypark à Sassenage © J. Guillou CBL

Quelques beaux mouvements d’entreprises ont été enregistrés en 2024. Conduite par Axite CBRE, l’opération de cession de l’ancien site de production de Schneider Electric à Montbonnot (3 bâtiments pour près de 20 000 m2) à Framatome, l’un des leaders mondiaux de l’énergie nucléaire, confirme l’attractivité du territoire de la région grenobloise. Framatome a d’ailleurs déjà planifié des extensions sur ce beau tènement de 42 500 m2. L’année a aussi vu l’installation de BSO, fournisseur d’infrastructures IA et de connectivité, dans 30 000 m2 des bâtiments historiques de HP, désormais arrimé à la Presqu’île. Ces opérations clés ne sauraient cependant masquer l’atonie du marché de l’immobilier d’entreprise sur l’année écoulée. « Le secteur a dû composer avec l’instabilité politique, le flou fiscal et réglementaire qui en découle, et un contexte économique plutôt morose, qui bloque l’élan des entreprises à se projeter dans de nouveaux locaux », observe Hugues de Villard, directeur de l’agence Axite CBRE à Grenoble et président de la Fnaim Entreprises Isère

Bureaux : panne générale 

C’est l’activité tertiaire qui littéralement dégringole. Avec seulement 36 000 m2 de bureaux commercialisés en 2024 autour de Grenoble, le volume de transactions atteint son plus bas niveau depuis au moins quinze ans, à comparer avec la moyenne décennale de 62 000 m2 annuels, d’après les chiffres de la Fnaim Entreprises 38. En contrepartie, les stocks de bureaux s'élèvent à 170 000 m2, encore en augmentation par rapport à 2023 (140 000 m2). Paradoxe apparent : le montant des loyers ne baisse pas. Intégrant les coûteuses innovations pour la performance énergétique depuis le décret tertiaire, le prix moyen atteint même 200 € le mètre carré sur le segment prime. Prohibitif quand les perspectives de croissance se nimbent d’incertitude. Des franchises temporaires de loyers, accordées par les propriétaires en échange d’un bail long, encouragent alors les entreprises à sauter le pas. Avec des secteurs géographiques plébiscités : « En temps de crise, Inovallée et la Presqu’île résistent mieux, parce qu’ils contribuent à l’image des entreprises et au confort au travail des salariés. En revanche, dès que l’on s’éloigne vers Voreppe ou Bernin, la demande est très faible car il y manque des bureaux premium », indique Sylvain Michalik, directeur de l’agence BNP Paribas RealEstate

Le Zento : les bureaux, modulables et accueillants, font entrer la lumière du jour à l’intérieur des plateaux de travail © J. Guillou CBL
Le Zento : les bureaux, modulables et accueillants, font entrer la lumière du jour à l’intérieur des plateaux de travail © J. Guillou CBL

 

Les parcs industriels arrivent à saturation 

Les locaux d’activité connaissent une situation plus nuancée. « Nous avons commercialisé environ 146 000 m2 en 2024, contre 102 000 m2 l’année précédente. C’est davantage que la moyenne décennale, à 126 000 m2. Les stocks, quant à eux, représentent approximativement 55 000 m2, soit à peine quatre mois de transactions », déplore Guillaume Woutaz, directeur de l’agence Arthur Loyd, à Grenoble. Il y a donc urgence à construire. Oui, mais où ? « La vallée du Grésivaudan sera bientôt arrivée à saturation », prévient Jean-François Clappaz, vice-président de la communauté de communes à l’économie et au développement industriel. L'installation de Unity SC achève de boucler Isiparc, à Saint-Ismier. Le spécialiste grenoblois des instruments de métrologie pour l’industrie des semi-conducteurs, intégrée au groupe Merck depuis la rentrée, y démarre la construction d’un bâtiment à énergie positive de 4 500 m2 (dont 1 600 m2 de salles blanches) qui multipliera par cinq ses capacités productives (investissement : 25 M€). Sur l’autre rive de l’Isère, Grande-Île à Villard-Bonnot ne pourra bientôt plus faire face aux besoins insistants des PMI, après avoir accueilli Vulkam et Injectpower en 2024. « Les demandes encore actives en ce début d’année se précipitent sur ces fonciers », observe Sylvain Michalik. Ultimes zones à aménager : Secrétan (4,5 hectares) à Montbonnot, Grignon (6 hectares) à Pontcharra, et l’extension des Fontaines à Bernin (sur 10 hectares près de Soitec). Un travail d’analyse doit maintenant être mené « en profondeur » pour définir les conditions de densification des zones existantes en vallée. En même temps, Le Grésivaudan prend un peu d’altitude : « Nous créons quatre petites zones d’activité de montagne pour répondre aux besoins des artisans et des entreprises du BTP, dévoile Jean-François Clappaz. Elles proposent 3 000 à 5 000 m2 sur les Petites-Roches, à Theys, à Saint-Martin-d’Uriage et même à Chamrousse, à proximité immédiate des lieux de vie, pour éviter les flux dans la vallée. » 

Et pour l’avenir… 

C’est peut-être sur les autres extrémités du Y grenoblois que les gisements fonciers restent le mieux identifiés. Tout au nord, parfaitement connecté à de grands axes fluides, « Centr’Alp garde de belles perspectives de surfaces, mais elles ne pourront pas être libérées à court terme », tempère Hugues de Villard. Le nouveau programme Actiparc de la Sure, à Voiron même, propose des lots divisibles à partir de 300 m2. Plus au sud, la Métropole de Grenoble poursuit la reconversion des anciennes papeteries de Pont-de-Claix, en partenariat avec Isère Aménagement : sur un terrain verdoyant de plus de huit hectares, cinq bâtiments portés par l’aménageur Altiprom sont dédiés à la production industrielle. « La commercialisation a commencé en 2023, mais il y a encore des possibilités d’implantation », pointe Guillaume Woutaz. 

Les regards se tournent aussi vers les dix hectares de l’ancien site Allibert, en friche depuis 25 ans entre Grenoble et Échirolles : « L’opération commence enfin à prendre forme, c’est un vrai sujet pour l’avenir de l’activité économique au cœur de la métropole », insiste Hugues de Villard. Le projet s’inscrit dans le vaste plan de réaménagement urbain GrandAlpe, qui inclut de nouvelles opportunités pour les entreprises, dans un environnement qualitatif (site Artelia, Bull, Alpexpo…). 

Vers de nouvelles formes urbaines pour l’économie ? 

L’invention de nouvelles formes urbaines s’engage peut-être : c’est dans un cadre bâti discontinu que pourront s’insérer demain de nouveaux pôles économiques à dimension humaine et agrégés à la vie quotidienne. Jean-Christophe Portay, directeur de l’immobilier de l’aménageur Groupe Elegia, résume : « Nous nous projetons clairement dans une démarche de densification de l’espace par la requalification d’anciens sites. » Illustration à Saint-Martin-d’Hères, où deux nouveaux bâtiments en cours de construction s’ajoutent au Diderot Labs (4 730 m2, déjà occupés à 80 % par des start-up), jouant avec la proximité du campus. Se dessine alors une ville plus compacte, remodelée par des bâtiments « mixtes, souples et adaptables ». Un scénario incompatible avec la grande industrie, bien que les dispositions contre l’étalement urbain obèrent ses possibilités d’implantations nouvelles en périphérie. Faut-il alors craindre une réduction de la diversité économique locale, et même une perte d’attractivité pour des implantations reliées aux secteurs d’avenir ? 

R. Gonzalez

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