Le Vercors au-delà de la saison blanche
La pandémie a figé les montagnes. Les stations du plateau, comme ailleurs, affrontent le choc d’un hiver privé des remontées mécaniques et des restaurants. Pour redéployer l’activité économique, les responsables du tourisme du Vercors misent sur l’image du massif et son positionnement historique.
“Nous n’avons pas eu d’hiver aussi enneigé depuis au moins cinq ans et nous ne pouvons pas ouvrir nos pistes, c’est tellement frustrant”, déplore Guillaume Ruel, président de SEVLC. La société d’exploitation des remontées mécaniques de Villard-de-Lans et de Corrençon-en-Vercors s’en remet aux seuls tapis de la Colline des Bains, pris d’assaut par les jeunes skieurs et les familles durant les week-ends. Pour eux, la station a aussi renforcé son offre de balades en traîneaux à chiens.
SEVLC, qui réalise 95 % de son chiffre d’affaires grâce à la neige (environ 7 M€ ces dernières saisons pour 400 000 journées-skieurs les bons hivers, près de 180 salariés avec les saisonniers) ne compte plus que sur les aides gouvernementales pour franchir cet hiver “sans”. “Nous avons tenu à reconduire tous les contrats de travail de l’an passé. Il est prévu que l’État prenne en charge finalement la totalité des versements de salaires dans le cadre de l’activité partielle. Nous avons l’assurance d’être soutenus, même s’il y aura des dommages collatéraux : nos saisonniers se sentent socialement exclus. Tout comme les restaurateurs et une partie des commerçants.”
Le ski de fond en pleine forme
Quelques signaux viennent nuancer le tableau. “Depuis Noël, nous battons presque tous les week-ends des records d’affluence sur la station, observe Fabrice Mielzarek, directeur de l’office de tourisme de Villard-de-Lans. Massivement, les skieurs alpins se tournent vers le ski nordique, à un point que nous n’avions pas pressenti.”
Le constat est le même sur la station voisine d’Autrans-Méaudre : “À défaut de ski alpin, cette situation inédite a permis à une catégorie de skieurs de redécouvrir la pratique nordique. Nous avons enregistré une augmentation de 30 % des ventes de forfaits durant Noël”, rapporte Christophe Lebel. Le directeur de l’office de tourisme intercommunal Autrans-Méaudre – Lans-en-Vercors parle même de “sur fréquentation” régulière : “Nous avons été débordés par les réservations de dernière minute pour des courts séjours, provenant essentiellement d’une clientèle de proximité.” Fin janvier, le chiffre d’affaires de son activité ski de fond dépassait déjà celui de toute la saison 2019-2020 (370 k€). Outre le ski de fond, les touristes se sont aussi adonnés au ski de randonnée alpine, sollicitant les moniteurs de l’ESF.
Leader du nouveau climatisme
"La crise sanitaire nous met face à une situation inédite. Mais il y a de la neige cette année, et nous savons proposer une grande diversité d’activités qui correspondent à une nouvelle demande”, poursuit Christophe Lebel.
À défaut de renflouer l’activité des remontées mécaniques, le Vercors peut donc se targuer d’éviter “une saison morte”, après un été 2020 qui fit le plein de randonneurs au-delà des prévisions, et un automne encore animé par les vététistes et autres adeptes du VAE ou du fat bike. Pour Fabrice Mielzarek, “le climat stimulant, la nature accessible et des commerces qui animent le territoire toute l’année offrent des conditions propices pour attirer des visiteurs sur les quatre saisons”.
Cet attrait conforte aussi une stratégie lancée fin 2019, juste avant la crise sanitaire : “Nous avons souhaité nous appuyer sur l’histoire du Vercors pour bâtir son avenir et retrouver le leadership dans le climatisme”, explique Valériane Jannet, responsable du pôle tourisme au sein de la Communauté de communes du massif du Vercors. Promues “climatiques” à partir des années 1930 par les autorités sanitaires et gouvernementales, les stations du Vercors devenaient les destinations des personnes malades et des enfants fragiles. “Ce climatisme s’est réinventé au fil des décennies, devenant un axe fort de notre développement. Il s’agit maintenant de rénover le concept en insistant sur tout ce qui permet aux personnes en quête de sens de trouver dans le Vercors toutes les ressources de bien-être”», exprime Valériane Jannet.
Optimiser la neige et l’été
Reste au Vercors à maintenir son propre équilibre économique, entre cette connexion à une nature préservée et le maintien d’une offre de ski alpin performante, au-delà des aléas climatiques et sanitaires. “Un bon enneigement l’hiver est nécessaire pour élargir notre clientèle et attirer notamment les skieurs issus de la France entière. Grâce à l’aide de la Région, la neige de culture à Autrans-Méaudre, un temps décriée, a trouvé son utilité”, défend Christophe Lebel. Si elle n’aura pas la possibilité de moderniser ses remontées mécaniques de sitôt, la station veut séduire avec davantage de services, une accessibilité optimisée, des hébergements valorisés et des animations, notamment en lien avec l’activité rurale du plateau. De son côté, la société d’exploitation des remontées mécaniques de Villard-de-Lans – Corrençon planche sur une nouvelle feuille de route. Où le ski alpin, moteur de la diversification touristique du Vercors selon certains élus du plateau, gardera toute sa place.
R. Gonzalez
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