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Aménagement — Le 5 septembre 2022

Locaux d’activités : alerte pénurie !

Les bâtiments et le foncier disponibles pour les activités de production atteignent leur niveau d’étiage dans la région grenobloise. Loin d’offrir une alternative aux grandes entreprises qui cherchent à s’implanter, les zones d’activités périphériques se heurtent à une réglementation de plus en plus contraignante. La requalification d’anciennes friches industrielles peut-elle assurer de nouvelles perspectives ?

Le parc d'activités Hyparc, à Sassenage © J. Guillou Perspective Building

La demande en locaux d’activités s’est rarement aussi bien portée. En hausse de 16 % en 2021, leur commercialisation dépasse 117 000 m2 : c’est le quatrième meilleur score en dix ans. Qui se double d’une autre performance : la demande placée de locaux neufs a explosé (+ 208 %) pour atteindre un niveau inégalé cette décennie, soit 11 400 m2. Au cours du premier semestre 2022, la FNAIM Entreprises 38 a encore dénombré 52 transactions sur le bassin grenoblois, soit une hausse de plus de 62 % par rapport à 2021. L’augmentation de la superficie totale des transactions atteint près de 52 %. Une nouvelle satisfaction, qu’un contrat hors norme doit modérer : « L’installation de l’usine Verkor sur l’ancien site de Schneider Electric près de la Presqu’île représente à elle seule 18 700 des 50 419 m2 écoulés », rappelle Hugues de Villard. Mais surtout, une grave pénurie de programmes neufs s’installe dans la région. La visibilité sur ce segment est très faible, malgré quelques programmes récents, distillés au compte-gouttes. Comme à Domène, aux abords de la zone industrielle, où l’ensemble des Colombiers à peine achevé affiche déjà complet. « Les 15 lots ont été très rapidement commercialisés », précise CGI.

Les start-up pénalisées par la pénurie

Les stocks de locaux disponibles accusaient en 2021 une baisse de plus de 43 % pour atteindre la surface plancher de 41 686 m2. Très loin des 165 787 m2 en 2015… Rien ne laisse espérer une amélioration à court terme. La congestion gagne désormais le marché, faute de foncier disponible. « Sans terrain, on ne construit pas, et donc on ne libère pas les lieux : c’est un cercle vicieux », dénoncent les professionnels. « Or, les entreprises ont besoin de locaux plus grands et plus qualitatifs. Nous sommes très inquiets. Pour certaines d’entre elles, nous n’avons strictement rien à proposer », alerte Guillaume Woutaz, dirigeant d’Arthur Loyd à Grenoble. Quelle est la typologie de ces entreprises qui restent à quai ? « Ce sont souvent des start-up qui souhaitent passer en phase de production. C’est d’autant plus compliqué qu’elles ont besoin de locaux qualitatifs pour leur image, avec une forte proportion de bureaux pour la R&D, et d’être reliées à des axes privilégiant les modes de déplacement doux », décrit Guillaume Woutaz. Des opérations telles que L’Yxium et le Premium, portées à Sassenage par l’aménageur Elegia, s’adressent à ces entreprises en phase d’industrialisation sur des domaines innovants. Un autre programme, également signé Elegia, prévoit d’ici fin 2023 de mixer activités tertiaires, laboratoires et locaux d’activités, dans la ZA des Glairons, à Saint-Martin-d’Hères. Ce bâtiment en R+3 avec découpage en lots à partir de 150 m2, sur 4 500 m2 de surface au plancher, sera certifié Breeam Very Good. De tels projets seront-ils suffisants pour accompagner les jeunes entreprises au moment critique de leur décollage ?

© Milk Architecte
D'ici fin 2023, le programme de la ZA des Glairons à Saint-Martin-d'Hères, mixera des activités tertiaires, laboratoires et locaux d'activités © Milk Architecte

 

Sécuriser le développement des entreprises industrielles

D’autres secteurs sont sanctionnés par le manque de projets immobiliers. Les entreprises du transport, de la logistique et de la livraison au dernier kilomètre sont impactées. Les collectivités n’auraient-elles pas assez perçu la progression de ce besoin, à l’heure de la généralisation du commerce en ligne ? « La logistique reste la mal-aimée des activités économiques en raison du nombre d’emplois ramené au mètre carré. Elle doit pourtant trouver sa place au même titre que les autres services pour que l’économie locale tourne bien », insiste Guillaume Woutaz. Il est urgent que le territoire accompagne le développement de filières d’avenir. « Dans l’hydrogène par exemple, Grenoble bénéficie d’un ensemble de start-up et de sociétés qui démontrent leur maturité. Nous devons renforcer et sécuriser leur avenir en leur proposant un foncier et de l’immobilier adaptés à leurs besoins », plaide encore le dirigeant de l’agence Arthur Loyd. Enfin, c’est toute l’industrie qui souffre du manque de foncier pour assurer la pérennité de son développement. Le déséquilibre croissant entre l’offre et la demande aboutit aujourd’hui à des hausses de valeurs locatives importantes, de l’ordre de 10 % et plus sur un an. Cette flambée condamne nombre d’entreprises à l’attentisme. À moins qu’un autre facteur les décide à se déplacer plus loin : la Zone à faibles émissions (ZFE), instaurée pour améliorer la qualité de l’air sur nombre de communes de la métropole grenobloise, inviterait déjà certaines sociétés à s’extraire du périmètre concerné. « Les entreprises ne critiquent pas la ZFE en soi, mais demandent que des solutions pertinentes en termes de véhicules propres soient proposées lors sa mise en place », appuie Hugues de Villard. La solution de la densification contre l’artificialisation Au manque de terrains disponibles déploré par les professionnels de l’immobilier d’entreprise sur la région grenobloise, la Métropole apporte un regard nuancé. Il reste des pôles de 1 ou 1,5 hectare en différents points de l’agglo, sur Actipole (Veurey-Voroize), au Saut du Moine (Champagnier, où Aledia construit ici son usine d’écrans LED nouvelle génération), ou encore sur l’ancien site des Papeteries de Pont-de-Claix, indique la Direction générale de l’économie et de l’attractivité. Dans le prolongement du parc d’Oxford, à Saint-Martin-le-Vinoux, le site des Sagnes est en cours de déploiement, sur plus de 3 hectares. Une opération de renouvellement urbain chère à la Métropole, qui veut dupliquer le modèle sur d’autres friches. Les regards se tournent aussi vers l’ancien site d’Allibert, à la lisière de Grenoble et d’Échirolles, qui proposera à la fin de l’année 2024 la commercialisation de 7 à 8 hectares pour des activités essentiellement productives. « Nous travaillons en permanence à développer les capacités de densification sur des zones urbaines identifiées. En lien avec les services de l’État, nous œuvrons aussi à l’assouplissement de certaines règles, notamment vis-à-vis du PPRI », assure la Direction générale de l’économie et de l’attractivité de la Métropole. Cette recherche d’optimisation foncière en territoire urbain s’accentue au moment où la démarche Zéro artificialisation nette interroge. Inscrite depuis 2018 dans le plan Biodiversité et reprise par la loi Climat et Résilience, la ZAN veut permettre à la France de préserver à l’horizon 2050 l’intégralité de ses espaces agricoles et naturels, aujourd’hui engloutis dans les aménagements au rythme de 20 000 à 30 000 hectares par an. Non seulement l’artificialisation des sols porte atteinte à la préservation de la biodiversité, mais elle contrevient aussi aux efforts déployés pour lutter contre le réchauffement climatique.

© DR
Le quartier Durand-Savoyat sur la Presqu'île, en plein renouveau © DR

 

Vers de nouveaux modèles de zones économiques

Consommer raisonnablement le foncier, dans la région grenobloise, revêt une importance majeure, sans doute plus qu’ailleurs en France compte tenu de la topographie. « La ZAN implique un bouleversement des comportements dont les acteurs n’ont pas encore mesuré toute la signification. On ne pourra plus considérer les terrains comme des biens de consommation courants et jetables, mais avec le risque de renchérir le coût du foncier existant et de décourager les investisseurs », pointe Guillaume Woutaz. La densification en cours de l’espace urbain est une première réponse face à cette contrainte. La verticalisation des pôles économiques sera peut-être la prochaine étape. Dans le même temps, les parcs d’activités gagnent en qualité d’usage et paysagère. La Métropole a engagé de nouveaux travaux sur les espaces de voirie de certaines zones, comme aux Vouillants à Fontaine, pour mieux les connecter aux mobilités propres. À Domène, la future zone des Tuileries (plus de 21 hectares à l’horizon 2024), dédiée aux activités productives, veut « conserver des espaces naturels et des activités agricoles compatibles avec le projet ». Elle intégrera même un sentier pédagogique valorisant la biodiversité des lieux. Aux architectes, aménageurs et décideurs d’imaginer la suite, pour une économie performante et responsable face à cette somme d’enjeux.

Infos clés

Il est urgent que le territoire accompagne le développement de filières d’avenir.

C’est toute l’industrie qui souffre du manque de foncier pour assurer la pérennité de son développement.

La ZAN implique un bouleversement des comportements dont les acteurs n'ont pas encore mesuré toute la signification.

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