Laurent Cornillon (Hifi Vaudaine) : "Le jour où... j’ai repris un magasin historique en France"

« Hifi Vaudaine est le plus ancien magasin de hifi en France. Bernard Vaudaine l’avait créé en 1964 et porté haut pendant plus de 40 ans. De mon côté, manager dans l’industrie, passionné de musique et de cinéma, j’avais créé une association de production d’événements artistiques, et j’achetais mon matériel ici. Il y a quatre ans, Marie-Pia Coustans, l’ancienne gérante, m’a glissé qu’elle voyait en moi la bonne personne pour reprendre le magasin et continuer à le faire vivre. J’ai longuement réfléchi. Je savais que je n’aurais pas le même train de vie et que ce marché était très compliqué depuis l’irruption du MP3. Après 27 ans de carrière, si je devais me laisser guider par ma passion, c’était maintenant ou jamais. J’ai mené cette reprise comme un challenge, en y investissant tout mon amour pour la musique et le beau son. Le magasin avait une clientèle fidèle mais présentait un inconvénient : sa petite taille. Dès la reprise, j’ai rationalisé les marques et les modèles, pour ne garder que le meilleur, notamment des marques françaises, et même grenobloises comme Ennium et Solen.

Un espace d’écoute indépendant

À ce moment-là, j’avais encore mon ancien job, j’étais toujours impliqué dans l’association… Je ne dormais plus. J’ai parcouru 3 000 kilomètres en une semaine pour rencontrer les fournisseurs. Et le coup de frein du Covid a été brutal. Si je continuais à ce rythme, tout seul, j’allais dans le mur. J’ai eu la chance de rencontrer des gens talentueux. Angèle, danseuse dans un festival que j’organisais, m’a aidé à démarrer, elle est restée deux ans à temps partiel ici. Et puis Benoît lui a succédé, un excellent musicien qui se reconvertit maintenant dans la philosophie, remplacé il y a deux mois par Noé. Il y a aussi mon fils, Maxime, étudiant en alternance, qui s’éclate ici, et ma fille Inès, qui me conseille pour la déco… C’est elle qui a choisi les couleurs de l’auditorium que j’ai créé en début d’année. Auparavant, les clients testaient le matériel dans l’arrière-boutique aménagée à cet effet. Maintenant, ils entrent dans un espace qui leur est entièrement réservé. Ils peuvent également y contempler des œuvres d’artistes locaux : nous tenons à cette mixité des émotions artistiques.

La chance d’un métier passion

Les ventes via notre site Internet, devenu marchand suite au Covid, ont doublé en deux ans. Mais la majorité de nos clients préfèrent pousser la porte. Ils viennent d’ailleurs de loin : la culture montagne de Grenoble nous amène des clients de Paris, Nice, Marseille, et aussi de Suisse, Allemagne, Belgique, en transit vers les stations de ski. Nous n’oublions pas que notre réputation tient également à l’accueil. Avec la séparation de l’auditorium, les gens entrent plus facilement dans le magasin principal. Nous passons du temps avec eux, les conseillons au plus juste. Et entre amoureux de musique, les discussions s’animent souvent. Aujourd’hui, j’ai la chance de faire un métier de passion, d’authenticité et de partage. »

Propos recueillis par R. Gonzalez

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